Classification des cartes

Soldat et jeune fille riant, Johannes Vermeer 1657

Il existe différents types de cartes qu’on peut classer en considérant soit le contenu, soit le mode d’expression (le contenant).

Les cartes topographiques

Les cartes topographiques, du grec topos (τόπος), lieu et graphein (γράφειν), dessiner, sont des cartes sur lesquelles figurent essentiellement les formes et détails du terrain, qu’ils soient naturels (notamment l’hydrographie et le relief, via les courbes de niveau, les points cotés ou l’estompage) ou artificiels (les constructions, les routes, etc.).
Elle permettent de déterminer la position et l’altitude, la forme, la dimension et d’identifier des phénomènes concrets fixes et durables dans la zone cartographiée.

Les cartes thématiques

Une carte thématique représente la variation d’un ou de plusieurs phénomènes géographiques. Elles expriment principalement des informations attributaires (indicateurs) portés par les objets cartographiés.
L’objectif de ce type de carte est de répondre à une problématique sur un sujet précis pour rendre compte du phénomène observé et facilité le cas échéant une prise de position ou de décision.

Carte dégradée ou choroplèthe

Une carte choroplèthe, du grec chôros (χώρος), zone/région et plethos (πληθαίν), multiple, est une carte statistique en aplat de couleur suivant un attribut de type numérique qui servira à définir une classification.
Elle est particulièrement adaptée à représenter une mesure statistique, comme la densité d’un phénomène. Ce type de carte facilite la comparaison d’une mesure d’une région à l’autre, ou montre la variabilité du phénomène.
Les données à représenter sont plutôt de type surfacique (dans le cas de données ponctuelles, on lui préférera généralement une carte de symbole).

Carte par catégories

C’est une carte en aplat de couleur en fonction d’un attribut de tous types. Dans ce cas, ce sont les valeurs d’un attribut qui serviront à coder la couleur.
Elle ne peut pas représenter un phénomène statistique ordonné mais peut indiquer la répartition spatiale d’un phénomène.

Carte de symboles proportionnels

Ce type de carte permet l’affichage d’un symbole suivant un attribut numérique qui code la classe et la grosseur du point affiché.
Il est particulièrement indiqué pour représenter un phénomène impliquant une quantité. La taille du cercle peut être répartie entre deux valeurs ou proportionnelle à la quantité.
La proportionnalité peut s’appliquer sur des points (taille du symbole) ou sur des lignes (largeurs). Dans ce cas, la largeur de la ligne va indiquer la valeur représentée (fréquentation d’une route par exemple).

Carte sectorielle

Ce type de carte représente sous forme de diagramme statistique (camembert, barres) un phénomène localisé sur un point. Lorsqu’il s’applique à une surface, il est localisé sur un point à l’intérieur de celle-ci (centroïde).
La superposition intégrale en un seul point étant impossible (sauf à passer en 3D), il permet de représenter plusieurs variables (attributs) en même temps et est recommandé pour visualiser un phénomène impliquant plusieurs candidats (résultat d’élection par exemple).
La taille du graphique correspond à la valeur totale des variables représentées. On peut le conditionner entre deux valeurs ou l’afficher de manière proportionnelle.

Carte d’activité ou carte de chaleur

Une carte de chaleur est une représentation cartographique qui, à la grandeur d’une variable, fait correspondre une teinte donnée dans une palette de couleurs.
C’est une carte d’accumulation et deux phénomènes proches spatialement vont s’additionner (se cumuler) sur la carte. Elle nécessite d’avoir des données ponctuelles pour fonctionner. Par défaut, seule la position du point est utilisée mais en choisissant un attribut numérique, on va pouvoir donner un poids au point représentant le phénomène.

Les cartes en 3D

Le support de technologies telles que le WebGL dans les navigateurs permet à ceux-ci d’exploiter la carte graphique de l’ordinateur et ouvre toute une gamme de possibilités pour la cartographie.
La carte prend de la hauteur et passe en trois dimensions…

Cela permet d’incliner la carte et de faire sortir des données “en relief” pour représenter une statistique.


Trajets de covoiturage pendulaire [Mericskay, 2020]

Mais toutes ces fonctionnalités sophistiquées, si elles offrent un rendu spectaculaire, rendent plus difficile pour les lecteurs d’évaluer les chiffres derrière une visualisation. Les vues inclinées présentent les éléments à l’arrière plus petits, parfois cachés ou obscurcis par d’autres éléments placés devant. Comme la vue de la carte peut être tournée et survolée, le nord n’est pas toujours en haut. Cela peut dérouter les lecteurs.

Au delà de cela, la carte peut elle même devenir une représentation immersive du monde et bascule vers son jumeau numérique, mais c’est une autre histoire

Les types de cartes

la carte de situation

Faite pour localiser un lieu ou un évènement, elle est minimaliste et n’offre que peu d’informations. Elle a vocation à être intégrée dans un contexte comme support à la location de l’information. Comme encart sur une page, par exemple, pour situer un emplacement, une manifestation ou les services publics d’une commune.


Le chat (par Geluck)

Elle peut inclure des outils pour permettre à l’utilisateur de se localiser (via le GPS de son navigateur) ou pour se rendre sur le lieu (itinéraire).

la carte d’inventaire

La carte d’inventaire, présente la localisation de phénomènes bien définis.
Elle permet de décrire un lieu de manière exhaustive dans un cadre déterminé (touristique, historique, aménagement, etc.).
La carte doit être mise à jour chaque fois qu’un nouvel objet est ajouté à l’inventaire ou si l’emplacement d’un objet donné change.

Carte de la BDForêt de l’Inventaire forestier
une nomenclature nationale en trente-deux postes

la carte de traitement

Ce type de carte permet à l’utilisateur de traiter l’information, c’est-à-dire faire des comparaisons, créer des groupements homogènes, quantifier certains groupes, découvrir des relations spatiales, grâce au travail de traitement préalable réalisé par le cartographe lors de l’élaboration de la carte.

Elle offre :

  • une vision fine et vision globale pour analyser l’image
  • un nombre limité de composantes à ce qu’il est possible de mémoriser pour permettre le traitement (le cartographe devra donc au préalable interpréter et sélectionner les données)
  • l’exhaustivité pour chaque composante
  • un fond repère réduit aux informations nécessaires à la localisation des données thématiques
  • des outils pour visualiser le traitement

le poster

Le poster n’a pas pour vocation à être vu sur un écran mais à être transmis ou intégré dans un document.
Il peut ainsi contenir des informations contextuelles (titre, indication, etc.) non présentes sur la carte elle-même.

Sa variante “en ligne” peut permettre à l’utilisateur de réaliser lui-même le choix de la zone et des couches d’impression pour une intégration personnalisée dans son propre document.


Unité urbaines de l’INSEE (voir en ligne)

la carte étape

Ce modèle de cartes permet de proposer une narration linéaire sur une carte en définissant des étapes qui vont conduire l’utilisateur sur un lieu et lui proposer une information spécifique. L’utilisateur va ainsi être guidé et naviguer de façon séquentielle à l’intérieur du récit, mais il peut également le parcourir en interagissant avec la carte ou avec les éléments (image, vidéos, etc.) mis à disposition par le récit.

Il est particulièrement adapté à un récit de voyage ou pour présenter la chronologie ou l’étendue d’un phénomène.

Le récit de Jules Verne sur une carte

les cartes comparatives

Les cartes comparatives affichent deux cartes côte-à-côte ou en superposition avec un curseur pour révéler la carte en dessous. Ce type de représentation autorise la comparaison de deux phénomènes sur une même zone ou d’un même phénomène à deux instants différents. Il a été popularisé en France par le site Remonter le temps de l’IGN.

les cartes agrégatives

Afin de mettre en évidence un phénomène spatial, la symbologie graphique ne suffit pas toujours et il faut introduire une modélisation graphique supplémentaire pour servir efficacement à l’interprétation à la représentation des espaces, leur distributions et la dynamiques géographiques. Généralement, les données initiales vont être agrégées (ou réparties) dans ce modèle.

On y retrouve la notion de chorèmes, conceptualisée par Roger Brunet, pour créer des modèles graphiques représentant un espace ou un type d’espace et les phénomènes spatiaux qui le concernent (Brunet, 1986).

Ainsi, afficher brutalement un ensemble de points sur une carte ne va pas forcément être représentatif de la densité ou de l’amplitude du phénomène observé. Les points venant se superposer, ceux du dessous ne seront plus visibles à toutes les échelles. Il va falloir définir une nouvelle modélisation de l’espace permettant de mieux appréhender le message de la carte.

Répartition en cluster pour la fête de la science 2019

Si la formalisation du modèle et l’analyse d’une distribution spatiale peut être rapidement compliqué, certains cas pratiques sont apparus avec le Géoweb.
Parmi ceux-ci, on trouve des collecteurs (carroyages ou maillages du territoire) qui vont agréger une variable dans une surface prédéfinie ou calculée en fonction des données, les clusters (regroupement et agrégation d’une valeur sur un point), les cartes de chaleur (ou heatmap, carte d’accumulation spatiale d’une valeur), les isochrones (ensemble des points à une distance ou un temps donné de l’information étudiée) qui vont permettre de mettre en évidence la distribution et la dynamique spatiale du phénomène observé pour le lecteur.

Modéliser un espace revient à rechercher ses structures et ses dynamiques fondamentales. Ce n’est ni résumer, ni généraliser, c’est-à-dire poncer peu à peu les « aspérités » jusqu’à produire une figure géométrique ; encore moins caricaturer.

Brunet, 1986

les cartes de flux

Une carte de flux est un type de carte thématique qui utilise des symboles linéaires pour représenter le mouvement (personnes, trafic routier, marchandises, eau, idées, télécommunications).

Les cartes de flux adoptent généralement une largeur de ligne proportionnelle à la quantité de flux (carte symboles proportionnel). Lorsque le flux est orienté, une flèche peut venir indiquer le sens du mouvement.


Carte figurative des pertes successives en hommes de l’armée française dans la campagne de Russie 1812-1813, Charles Minard, 1869

les cartes en temps réel

L’avènement de l’informatique et du Géoweb permettent d’inclure dans les cartes des données dynamiques mises à jour en temps réel (ou quasi réel).

On distinguera les cartes statiques, pour lesquelles on affiche la situation au moment de l’affichage de la carte (il faut rafraîchir la carte pour avoir la nouvelle situation) et les cartes dynamiques qui vont s’animer en fonction de la mise à jour du phénomène.
Si les premières sont assez faciles à réaliser (il suffit de charger la situation initiale), les secondes nécessitent l’accès à la donnée via des API pas toujours standardisées pour fonctionner et utilisent des mécanismes spécifiques pour l’animation.

Stations VCUB en temps réel
Les données proviennent du fichier GeoJSON proposé par OpenData Bordeaux au moment du chargement de la carte.

les cartes intégrées

Dans ce cas, la carte ne sera plus le centre de la visualisation, elle s’intègre dans un document ou une page web plus vaste dont elle n’est là que pour illustrer le sens, comme une image ou une vidéo. Elle n’est pas toujours interactive pour ne pas gêner la lecture du contenu qu’elle illustre mais peut le devenir pour offrir une information supplémentaire (comme une vidéo va être lue, la carte va être parcourue).

Par exemple, pour inciter les contributeurs à recenser les bornes de propriété, l’IGN présente sur son site une carte recensant les bornes déjà collectées et sur laquelle le lecteur pourra visualiser celles présentes sur sa région.


L’intégration d’une carte permet d’illustrer le propos d’un article
Recensement des bornes sur le site de l’IGN